Copié dans marianne2.fr : Pierre Moscovici et la difficulté de faire face au troll méprisant ou pas !!
Dans une lettre aux blogueurs publiée hier, Moscovici s'agace. Nous noterons au passage que Pierre Moscovici n'a pas encore bien compris la blogosphère, cette note publiée s'adressant à ses lecteurs et commentateurs, et non aux blogueurs comme il l'écrit en titre : n'est pas blogueur toute personne qui fréquente les blogs, mais celui qui en écrit. L'heure est grave donc, comme l'écrit Moscovici lui-même à propos de son média : "ce blog est menacé de disparition". L'objet de cette menace ? "quel que soit le sujet traité, qu'il s'agisse du retour de la France dans l'Otan, des manifestations des 29 janvier et 19 mars, de mon voyage au Québec, des élections en Israël, des propos du pape, de la politique économique de Nicolas Sarkozy, de mon action dans le Pays de Montbéliard, de la situation du PS aussi..., le débat dégénère très vite dans une foire d'empoigne, au ton pas toujours très digne, sans argumentations dignes de ce nom, autour d'un thème obsessionnel : Ségolène ou Martine, avec périodiquement le retour de DSK, et sporadiquement l'émergence de telle ou telle personnalité plus jeune, jugée tantôt charismatique, tantôt médiocre".
Dure réalité. Comme tout blogueur, Moscovici doit faire face à des trolls, ces internautes (blogueurs ou non) qui ne postent des commentaires uniquement dans le but de vous mépriser, de vous insulter, de dévier la conversation ou de faire passer des messages "publicitaires" sans lien aucun avec le sujet du post. (Je salue au passage l'un de mes trolls préférés ). Pas marrant parfois, déprimant souvent, les notes que l'on juge parfois les plus intéressantes étant les moins commentées, les plus ignorées. Comme l'écrit Charles sur le blog Vicastel, "la “commentosphère” est un aspect par essence indissociable des blogs - la notion de discussion étant intrinsèque au blog - mais elle peut paradoxalement mettre en danger les blogs eux-mêmes". Moscovici devra apprendre, s'il veut pouvoir continuer à bloguer, à passer outre. Ou bien à modérer a priori les commentaires, parfois utile durant quelques temps pour éloigner les parasites.
Mais au-delà du troll, et le cas de Moscovici est particulièrement parlant, le blog reste tout de même un média merveilleux pour que ces politiciens restent en contact avec la réalité des Français. Ces lieux tenus par des notables avec un accès constant aux médias et aux projecteurs attirent en effet tous ces papillons silencieux qui globalement permettent de bruisser des véritables préoccupations du peuple. Du peuple qui trouvent un moyen de témoigner de leur quotidien. Ou des militants socialistes, dans le cas de Moscovici, qui peuvent enfin s'exprimer sans être confrontés aux censures des organes hiérarchiques du PS.
Dans la série "hommes politiques confrontés sur leur blog aux dures réalités de la médiatisation", le blog de Julien Dray fait figure d'exemple. Chez lui, peu de lecteurs et peu de commentaires. Très souvent moins de 10 commentaires par article, et bien souvent un bon "0 commentaire" pour certains de ses posts. Une exception : 47 commentaires pour une note sans réel intérêt. Seule raison de cette sur-activité : les ennuis judiciaires de Julien Dray. Les internautes ont donc profité de l'existence du blog de Julien Dray pour cracher leur haine ou pour apporter des messages de soutien. Le blog ne servant alors qu'à exercer un rôle de café du commerce, que les hommes politiques devraient plus souvent fréquentés in real life pour (enfin) se rapprocher des citoyens ...
Comme le dit si justement Dominique Wolton (sociologue spécialisé dans la communication notamment politique) dans un article du journal La Croix : "communiquer, c’est s’adresser à un autre qui ne nous comprend pas car il n’est pas nous-même. C’est construire une relation avec autrui en sachant qu’il est un autre. Communiquer, au fond, c’est apprendre à cohabiter". Les hommes politiques devront apprendre à cohabiter avec la communauté des internautes. Ou s'éloigner encore plus des Français pour ne pas être confrontés aux critiques.
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